Tout au long du week-end, les places et ruelles de la ville haute de Provins ont vécu au rythme frénétique et joyeux des 37e Médiévales, enfin de retour après deux éditions manquées. Et pour fêter ces retrouvailles, la programmation, toujours si foisonnante et plurielle, nous a donné matière à croquer du spectacle vivant à pleines dents deux jours durant !
La place du Châtel, point névralgique des festivités, a été le théâtre de multiples concerts. On y a notamment vu Trybu, la formation musicale formée par Les Monts Rieurs. Les six musiciens ont fait sonner leurs rythmes voyageurs et entrainants. Même lors de leurs balances, le samedi après-midi, un public curieux venait attraper au vol les quelques fragments de morceaux joués ! Les Carillonneurs de la compagnie Gueule de Loup ont fait tintinnabuler leur carillon, du sommet de leur tour, accompagné d’une harpiste et d’une violoniste. Dans un paysage musical médiéval plutôt habitué aux gros sons des cornemuses, des hautbois et des tambours, celui, clair et envoutant de ces Carillonneurs a été l’une des belles surprises de cette édition !
Dans les douves, les compagnies se sont succédées pour animer le chemin à l’extérieur des remparts. Créalid a déambulé à plusieurs reprises avec son spectacle Les Catapultés. Prenant à parti le public, cette joyeuse farce a su faire mouche auprès des spectateurs, enrôlés de force pour prendre la citadelle ! En musique, Corazon, avec ses instruments très sonores et puissants, a su créer autour de chacune de ses prestations un bel attroupement, venu recevoir la musique survoltée du quintet. Le public a également apprécié les interventions régulières du jongleur qui contribue à rendre la proposition plus visuelle, et qui ont encore davantage ambiancer l’auditoire !
Au fil des rues, le public s’est laissé surprendre par les compagnies en déambulation. Pour cette 37e édition des Médiévales de Provins, Sembadelle était de retour avec sa Milice, composée de cinq combattants venus des quatre coins du globe. Les cinq comédiens n’ont pas manqué d’exercer tout leur zèle pour verbaliser allègrement les badauds qui croisaient leur route. La Milice nous avait déjà convaincus en 2018 lors de son premier passage à Provins, et une nouvelle fois, nous avons pu constater le caractère très abouti de ce projet, dont l’univers visuel fonctionne particulièrement bien dans ce type de fêtes. Chaque costume donne du corps au personnage qui l’arbore et est poussé dans les moindres détails. Les illustrations, peintes sur chacune de leur monture, du poney au caribou, finissent de compléter le tableau de cette esthétique extrêmement soignée.
Cette caractéristique très forte s’est retrouvée dans la déambulation de la compagnie Bric à Brac. Même après les avoir vues à plusieurs reprises, la marionnette géante d’Omoloùnka et les créatures qui l’accompagnent continuent de fasciner. Tout, dans ce projet, est d’un raffinement rare. Les marionnettes en elles-mêmes suscitent la curiosité, l’envie de s’en approcher, d’en découvrir les rouages, les finitions, les matières et les textures. Au-delà du visuel, les artistes de la compagnie qui les mettent en mouvement agissent avec une telle fluidité que ces créatures semblent tout à coup devenir extrêmement réelles et vivantes. Même le géant, pourtant imposant, semble flotter au-dessus dans une lenteur qui rend poétique chacun de ses mouvements. Les deux oiseaux qui l’accompagnent suscitent le même intérêt : leur plus petit taille les met à hauteur du public qui, par surprise, se retrouve face à ces sublimes créatures qu’on ne se lasse pas de croiser.
Dans la rue du Palais, la compagnie Zoolians a également étonné et retenu l’attention du public. En duo, un artiste chevauchant sa monture dragon et une comédienne pour l’accompagner, les Zoolians ont montré combien l’esthétique perfectionnée de leur projet était une vraie ligne de conduite. Tant dans l’articulation du dragon, dans son design, que dans les costumes des deux artistes, tout est poussé au maximum pour créer un visuel fort, qui capte le public et qui interpellent immanquablement le plus jeune public.
Enfin, la découverte du week-end demeure pour nous la compagnie Soñj, groupe de musique venue de Bretagne. Arborant des costumes aux allures byzantines, proposant un périple de l’Orient à l’Occident, les cinq musiciens ont offert un véritable voyage musical métissé. Hautbois, davul, vièle à roue, cornemuse et nyckelharpa se sont entremêlés tout au long du set. Outre la qualité musicale de cette proposition, sa mise en live nous a également beaucoup interpellés. Chez Soñj, le live est mis en scène. Aucun musicien n’est statique : les atomes s’accrochent les uns aux autres, puis se désolidarisent pour mieux recomposer d’autres schémas. D’une ligne, ils se scindent en deux duos, tandis que le joueur de davul monte sur un piédestal, avant de finalement revenir en cercle. Chez Soñj, le voyage n’est pas que dans la musique. Chez eux, tout est mouvement, d’un bout à l’autre de leur univers.
Pour leur grand retour, les Médiévales de Provins ont offert au public un week-end aussi festif que plein de richesse. Malgré la pluie qui a gâché la fête le samedi après-midi, cette 37e édition a tenu toutes ses promesses, et a permis aux habitués de l’événement, comme aux primo-venants, de retrouver la joie et l’effervescence d’une fête pleine de surprises, de découvertes, qui célèbre terriblement bien le spectacle vivant et les arts de la rue !